Clémence Debris, de l’Australie à Bali
Où as-tu grandi ?
En Normandie.
J’étais une enfant assez timide, très souvent dans ma bulle. Mon enfance était heureuse, on avait une maison avec un jardin et je me souviens d’avoir toujours aimé faire des choses de mes mains. J’écrivais beaucoup aussi et en grandissant, que ce soit au collège ou au lycée, on m’a souvent répété “vas dans la publicité si tu aimes écrire”.
Donc tu es allée dans une école de pub ?
Oui dans une école à Paris. Puis j’ai commencé à travailler dans une grosse entreprise en tant que conceptrice-rédactrice. Je travaillais avec une directrice artistique : on écrivait des spots télé, on concevait des affiches.. Je m’occupais plutôt des mots et du contenu et je collaborais avec un directeur artistique pour l’identité visuelle. Le problème c’est que ce métier ne me correspondait pas et je ne m’épanouissais pas dans les missions quotidiennes.
Quel a été le déclencheur pour quitter cette vie-là ?
J’avais très envie de voyager et ma meilleure amie avait rencontré un australien lors d’un précédent voyage en Inde. De fil en aiguille on s’est dit “allons en Australie” !
J’y suis restée presque 4 ans... On est arrivées en 2016 et j’avais 24 ans.C’est là-bas que j’ai découvert la poterie.
Dans une petite ville au sud de l’Australie, on faisait du Woofing et j’ai atterri chez un céramiste qui avait un atelier et une galerie d’art. Il m’a expliqué la cuisson au bois et j’ai découvert un four Anagama, un four immense de 3m3 : c’était un vrai coup de cœur. Je suis tombée amoureuse de la poterie et je suis restée en stage 6 semaines là-bas !
C’est à ce moment-là que tu as su que tu voulais en faire ton métier ?
Je ne savais pas si c’était une petite passion ou plus que ça. J’avais besoin de creuser pour comprendre et d’apprendre. Je suis donc partie un mois à Bali en immersion totale, dans un atelier en plein milieu de la jungle qui s’appelle “Sariapi”.
C’est comment un atelier dans la jungle ?
C’était incroyable ! Il n’y avait pas de murs, c’était complètement ouvert sur la jungle, la vue était magnifique. C’est Suzanne, une suisse qui tient cette école. Très vite je suis devenue complètement accro, dès que c’était fermé je m'ennuyais, j'étais complètement addict. Je ne m'arrêtais pas et j’ai beaucoup progressé. Suzanne nous faisait tellement confiance que quand l’atelier était fermé on y était quand même. Je me souviens, c’était la saison des pluies, parfois il pleuvait à grands torrents dehors, on était sur nos tours, on tournait …c’était dingue.
Tu as fait quoi ensuite ?
J’ai fini par rentrer en France, le covid, tout ça.. .J’ai trouvé une école en Normandie et une formation de 14 mois financée par la région. On avait une super promo, j’étais d’ailleurs avec Charline Robache, une autre céramiste du collectif ;).
Avant de commencer cette école, je suis partie en road trip autour de la France et j’ai découvert Digne. J’y ai rencontré une potière qui cherchait quelqu’un pour reprendre son atelier. Il était magnifique.
J’ai hésité mais je manquais encore de technique, je suis donc allée faire ma formation en Normandie. Finalement après l’école j’ai pu reprendre son atelier, le timing était parfait.
Après tes différents voyages et ton retour en France, tu penses avoir trouvé ta voie ?
Oui, la terre ça m’a vraiment ancré dans quelque chose. Être potière ça te pose forcément quelque part, ça m'a fait du bien. Ca a été difficile de rentrer en France : l’administration, le regard des autres, il a fallu se réadapter, mais j’étais contente de savoir ce que je voulais faire.
Tu peux nous dire un mot sur ton univers ?
Au fil de l’eau, je suis arrivée à des pièces très brutes : j’avais envie de chercher ma terre, chercher mes matières etc.. mais je sais que c’est un travail monumental de récolter sa terre. J’ai trouvé un juste milieu : je décore mes pièces avec ce que je vais chercher dans la nature. L’idée c’est de développer le plus possible avec ce que j’ai autour de moi, en faisant attention, mais en étant réaliste aussi. J’aime la couleur naturelle de la terre, des sables, des rochers.
Et la cuisson au bois ?
Ça me passionne. J’ai fait un stage chez Michel Cohen, il est dans la transmission, c’est un super monsieur. J’ai eu des résultats satisfaisants pendant son stage, je compte en faire d’autres. L’idée c’est de construire mon propre four à bois.. Un vrai rêve !